Les paysages d’Elisa Cossonnet (artiste fidèle de la Galerie de l’Ancien courrier à Montpellier), du moins ceux qui sont exposés jusqu’au mois d’août en la chapelle des Ursulines, Espace Lawrence Durell, à Sommières, s’ouvrent sur un arrière-pays qui laisse place à tous les possibles.
C’est que son travail s’appuie avant tout sur l’imaginaire : il suffit de s’approcher de ses tableaux pour perdre les figures identifiables et se laisser glisser dans un bain d’abstraction. Les éléments semblent y jouer un rôle important, la terre et ses montagnes certes, le ciel et ses caprices sans doute mais surtout l’élément aquatique, lequel paraît occuper le premier plan même s’il s’apparente davantage à une étendue lacustre ou marécageuse qu’à une mer ou à un océan. Un entre-deux. Un no man’s land. Un peu comme un tableau entre sa conception et sa vision définitive. Toujours est-il que l’artiste inverse les codes habituels du genre paysager puisque c’est à partir de l’eau que s’observe au loin la terre. Un peu comme à partir de l’imaginaire ou du rêve on peut espérer accoster sur la terre ferme ou poursuivre le voyage sous d’autres cieux.
La peinture, telle que la pratique, Elisa Cossonnet est donc une invitation au voyage et un voyage suppose un horizon, omniprésent dans ses toiles, les grandes au mur comme les petites au sol, plus abstraites au demeurant. L’atmosphère est en général brumeuse, le passage d’un plan à l’autre fluide, les gestes et coulures ne se cachent pas, les contours sont indécis. Les techniques sont multiples et mêlent la lenteur de l’huile à la spontanéité de l’acrylique ou de l’eau. Aucun personnage ne vient troubler la surface – de l’eau comme de la toile. C’est que cette peinture peut être qualifiée de résistante en ce sens qu’elle nous éloigne du tumulte des villes surpeuplées un peu comme l’artiste prend du recul avec le réel pour explorer, par la peinture justement, les voies de l’imaginaire. On n’est pas si loin de la poésie.
Précisément, l’artiste ponctue ses plans aquatiques d’embryons de poèmes, répétitifs comme des vagues, et qui prouvent bien qu’avant de s’avérer paysage son tableau est composé avant tout de couleurs dans un certain ordre assemblées. Dans sa peinture, les verts dominent peut-être parce que cet espace-temps qu’ils désignent est utopique et nous rapproche d’une vision relative de paradis : le vert paradis dont parle le poète. En ces périodes de fureur et de bruit, cette peinture fait du bien et nous rappelle que l’on ne saurait imaginer un monde sans paysage, comme le souhaitait Yves Bonnefoy. Il en est de même de la peinture. Sans le paysage, ce style de paysage, ceux que peint Elisa Cossonnet, dans quel monde vivrions-nous ?
BTN
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