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Sigean | Hommage à Piet Moget et Carel Visser, dans un dialogue avec Wieteke Heldens au L.A.C du 6 juillet au 28 septembre

11 Juil 2025 | Arts plastiques, Aude, Expositions

On ne souligne pas suffisamment le rôle que le LAC de Sigean aura joué dans l’animation artistique du grand Languedoc bien avant que le Crac, le Mrac, le Miam, a fortiori le MO.CO. n’aient vu le jour. On le doit à l’énergie et la passion d’un homme, l’artiste et collectionneur Piet Moget, lequel nous a quittés, cela fait 10 ans maintenant. Un chiffre rond ça se fête. Sa fille Layla a pris le relais, qui rend cet été hommage à son père, né et décédé la même année que son compatriote, le sculpteur néerlandais Carel Visser. Peinture et sculpture sont faites pour se compléter et se partager l’espace, il n’en manque pas aux anciens chais du LAC.  Il fallait pourtant ne pas figer les deux artistes dans le passé, et prouver qu’ils pouvaient dialoguer pas seulement entre eux, mais avec les nouvelles générations.

C’est ce qui explique la présence de la néerlandaise Wieteke Heldens, laquelle apporte de surcroît sa touche si l’on peut dire féminine. Piet Moget, à l’instar de son Mondrian, a peint tout d’abord des paysages avec arbres et sans personnages, ce qui ne l’empêchait pas de pratiquer en même temps le portrait intimiste. Durant l’après-guerre et sous l’influence de Geer Van Velde, il a petit à petit dépouillé le tableau de ses figures pour se concentrer à la fois sur la ligne d’horizon, sur une palette lumineuse et nacrée ou irisée, sur le genre de la marine aux limites de plus en plus indécises entre les éléments.

C’est un peu ce que l’on retrouvera dans cette expo estivale, en grand et petit format, avec une majorité de tableaux peints à Port la Nouvelle, sur le motif, selon un protocole quotidien parfaitement rodé. Piet, c’était l’obstination à repeindre incessamment le même paysage, une étendue marine sous un ciel plus proche sans doute de sa mer du Nord natale et de La Haye que de notre midi méditerranéen. La ligne d’horizon variait, d’un tableau à l’autre, elle se chargeait même d’irisations subtiles et la lumière présentait de multiples apparences, plus ou moins atmosphériques, justifiant la quête tenace de sa lente saisie, à l’huile. Ainsi traitait-il autant du temps que de l’espace. Il privilégiait le carré, à échelle corporelle, mais recourait aussi au rectangle, vertical ou horizontal. Comme il n’aimait pas peindre en intérieur, on peut dire que l’horizon marin à lui seul résumait le monde extérieur, tous les voyages possibles, réels ou imaginaires. Et le monde dans sa totalité, concentré sur deux pôles, le marin et le céleste, sachant que le peintre gardait bien évidemment les pieds sur terre. Durant les années 60, il s’est essayé à la représentation d’une sphère, comme amarrée au paysage qui persiste. C’était une manière de suggérer l’envol vers le haut et donc un voyage vertical, lui qui a tellement privilégié l’horizontale. Il y avait sans doute un désir chez le peintre de montrer que son attachement au réel se doublait d’aspirations d’ordre spirituel.

Carel Visser a alterné le minimalisme de plus radical et des réalisations plus allusives de type animalier ou végétal. Il construisait, en fer ou acier, des pièces  puissantes fondées sur l’accumulation, l’entremêlement, la juxtaposition. Il se référait à l’architecture intérieure et ses poutres, fenêtres, escaliers. Mais sa créativité débridée le poussa vers des matériaux moins austères et qui se plient, se roulent, penchent, glissent et se suspendent. Il introduisit des objets récupérés (pneus ou vitres par ex) et par là même la surprise et l’humour. Ses réalisations se nomment alors Animal, Sailing car et même Landscape. Il ne se contente pas du sol mais se glisse le long des murs où apparaissent d’étranges créatures, tout en dynamisme et fantasque, en carton découpé frotté au graphite. Visser c’est la surprise garantie, une façon bien à lui de dompter le matériau en le poussant jusqu’aux limites du burlesque, du décalé, de l’hybride même s’il est tout à fait capable de sobriété. Au Lac, on pourra voir aussi ses dessins et collages sur papier dont un auquel il associe une grappe de raisins, qui font sens dans cette Aude viticole.
Le travail pictural de Wieteke Heldens se veut avant tout léger, jouant sur la dissolution et la distribution des formes et couleurs sur la surface. Elle semble collecter des gestes, leur adjoint des nombres, se rapproche d’une écriture abstraite. Elle s’est constituée une mythologie propre, issue de ses voyages (New York) ou de ses origines (The Légend of Holland). Elle est la véritable révélation de cette proposition tripartite, placée sous le signe du plat pays. Et du dialogue intergénérationnel. « Intergenres » aussi.

BTN

Plus d’infos : lac-narbonne.art

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